COUP DE DOULE À NICK CARTER

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Plus qu’un simple roi des détectives, Nick Carter était le caméléon des fictions populaires.
Sherlock Holmes américain à la fin du 19e, adversaire de Zigomar dans les sérials de la firme Éclair, détective dur-à-cuire au format pulp et à la M.G.M., Nick Carter changeait d’atour au grès des saisons, en un constant va-et-vient des deux cotés de l’atlantique.
Rien d’étonnant donc, à ce qu’on le retrouve en 1964 reconverti espion argentique dans une production européenne, empruntant les traits d’Eddie Constantine sous la houlette de l’écrivain et journaliste Jean Marcillac.
Générique.
Les films Fernand Rivers S.A. présentent / Nick Carter va tout casser !

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Mais ça ne barde pas que sur pelloche.
Marcillac fait coup double et publie aux éditions de l’Arabesque la novélisation de son scénario. Si le film pâtissait de la réalisation lymphatique d’un Henri Decoin en fin de course, le roman est plein d’entrain.
Marcillac s’amuse à relooker ses lectures d’enfance. Des Chinois veulent s’emparer d’une machine à dézinguer avions et fusées. Leur chef, une vamp bridée, dépèce ses amants et les passe au broyeur électrique après l’amour.
Forcement, Nick Carter enquête, son petit chapeau vissé sur le crâne. Avec pour toile de fond un vieux château hostile, une campagne obscure et la côte d’azur.
Si l’intrigue a contracté au contact de son époque le virus de l’espionite légère, les décors ne se déparent pas de la touche feuilleton début du siècle que Marcillac distillait déjà dans l’émission radiophonique Les exploits de Nick Carter – cette même touche que l’on retrouve aussi dans les entêtes de chapitres : L’anneau de la mort, L’homme à la cagoule, Une fumée couleur de sang, L’usine à massacre.
Du bon boulot – seul effort de Marcillac dans le genre – et qui, à la manière du Silence Clinique d’Eddy Ghilain (autre one-shot cinématographique et littéraire de l’espionnage-pop à la française), réussi à concilier le goût du rétro aux coups d’accélérateurs rageurs des sixties.

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Contrairement à Marcillac, les éditions de l’Arabesque et les producteurs de cinéma remettront (mais pas de conserve) le couvert les années suivantes.
Les premières lanceront dans leur collection Espionnage la série Nick Carter – Agent spécial privé écrite sous le pseudonyme de Noël Ward par Jean Buré (alias Jan de Fast au Fleuve Noir et Karol Bor à l’Arabesque.) Paraîtront 7 épisodes, de 1966 et 1969.
Les seconds produiront en 1965 un deuxième et dernier film – Nick Carter et le Trèfle Rouge – toujours avec Eddie Constantine dans le rôle titre mais, Alphaville étant passé par là, substitueront au cinéma à la papa de Decoin une approche toute nouvelle-vaguiste de la chose. Le résultat, signé par un assistant de Godard, Jean-Paul Savignac, est fort plaisant pour qui aime le bazar, l’approximation et l’humour. Jeanne Valérie (la sœur de Gérard Blain dans le Joë Caligula de Benazeraf) y est magnifique et le scénario, allez comprendre pourquoi, est adapté d’un roman de Claude Rank, Bombe sur table, paru aux éditions du Fleuve Noir (collection Espionnage # 463, 1964). Rien avoir avec Nick Carter, il s’agit là d’une aventure de Jeff Larson, alias K-16, espion de papier que Ray Danton interpréta au cinéma en 65 dans Corrida pour un espion, signé Maurice Cloche et adapté de la première aventure de K-16 (Corrida pour un espion, Claude Rank, Fleuve Noir # 459, 1964)
Vous avez suivi ? Si oui, Nick Carter vous tire son chapeau.